Marie-Claude Malo

« La Fondation m’a permis de mettre mes soucis financiers à l’écart. »
À la fin de novembre 2011 se terminaient pour moi deux mois intensifs de radiothérapie, combinée à de la chimiothérapie. Cocktail intense! Ce fut aussi un séjour fort agréable à l’Hôtellerie de Trois-Rivières de la Fondation québécoise du cancer où j’ai été dorlotée, protégée et merveilleusement bien accompagnée.C’était pour un cancer de l’amygdale; intubée, meurtrie, des cheveux en moins, mon corps ne m’appartenait plus. Il ne me restait plus, dans l’âme, qu’une toute petite bougie d’amour de moi, alimentée par une confiance inébranlable, protégée de l’adversité par une famille aimante et une équipe médicale dévouée.
Je pensais pouvoir manger de la bûche de Noël en décembre 2011, ça a dû attendre Noël 2012, de peine et de misère. Parce que la crème glacée qui fut jadis si réconfortante n’était même plus tolérée. Parce que le vindredi s’était transformé en laitdredi. Parce que ma bouche hurlait sa douleur alors même que mon âme aurait voulu s’apaiser. L'équipe de la Fondation a été là pour moi dans ces moments-là et les psychologues aussi! Tous réunis dans un même but : que je trouve de nouveaux repères.
C'est donc un immense merci que je souhaite adresser à tous ceux qui m'ont permis de passer à travers la maladie.
En plus d'avoir bénéficié de l’hébergement à l’Hôtellerie de Trois-Rivières, j'ai pu aussi avoir accès à des repas à prix réduit. Étant travailleur autonome, avec peu d’assurance, cette aide m’a permis de mettre mes soucis financiers à l’écart. J’ai aussi utilisé la cuisine mise à notre disposition et participé à un repas communautaire fort agréable où nous avions dit au revoir à l’une d’entre nous qui avait terminé ses traitements.
De plus, le fait d’être à l’Hôtellerie « m’obligeait » à prendre soin de moi à temps plein et j’en oubliais mon entreprise que j’avais laissée entre de bonnes mains. Le fait que les locaux soient directement reliés à l’hôpital a aussi facilité mes traitements et m'imposait une marche quotidienne, question de faire brasser l’énergie vitale!
Aussi, et ce n’est vraiment pas négligeable, il y avait la qualité des services offerts et les petites attentions du personnel; que ce soit la préposée qui veillait à ce que tout reluise, même notre moral, la réceptionniste qui passait la commande de nos médicaments à la pharmacie ou le gentil concierge qui venait laver la salle de bain après un épisode, disons éclatant, d’après-chimio en plein milieu de la nuit. En plus de ramasser les dégâts, il nous rassurait et laissait la place propre et dégagée de toutes odeurs incommodantes.
Il y a aussi eu toutes les activités : lecture, casse-tête, Qi Gong, massothérapie… Vous dire le bonheur de retrouver une table de massage alors qu’on a l’impression que notre corps ne nous appartient plus. C’est magique! Et très libérateur côté émotionnel. Les larmes peuvent couler sans l’ombre d’un jugement, dans l’acceptation de ce moment difficile. La kinésiologue m’a aussi aidée, en toute simplicité et selon mes limites, à conserver une certaine forme physique.
Et puis il y avait les salons télé. Merveilleux troisième étage vide qui me permettait de m’isoler! Certains nouveaux résidents m’ont peut-être vue y aller et sont venus me rejoindre dans ce havre de paix et de tranquillité. Nous avons écouté Shrek et Roger Rabbit en silence, un sourire au coin des lèvres. Des amis sont aussi venus me visiter, dans la salle commune. Un beau moment!
Et que dire de l'acceptation de la Fondation de loger ma mère pour ma dernière semaine de traitements. Elle m’a aidée à me tenir debout, car je n’en pouvais plus. Elle m’a aussi mentionné qu’elle ne savait pas comment je faisais. Moi je sais à quel point le support de la Fondation a été à la fois discret et indispensable pour moi.
La Fondation québécoise du cancer reste dans mes prières quotidiennement. Simplement de l’écrire fait monter en moi une vague d’émotions immenses et intenses. Que de douceur et de calme elle m’a offert!
Le années suivantes ont filé à la vitesse de l’éclair, à me reconstruire, à tenter de me retrouver, à vouloir reprendre possession de ce corps et de cette tête qui n’étaient plus les miens. En 2017, je me suis inscrite à l’UQTR. Si je voulais que ma vie soit différente, alors aussi bien penser différemment! Je me suis faite plaisir avec un certificat en interprétation théâtrale. En 2019, j’ai roulé en moto jusqu’à La Tuque. En 2020, j’ai grimpé le Mont-Saint-Joseph, une ascension de 1 054 m. Un périple de 5 heures, en raquettes, avec une luge harnachée à la taille.
Le long cri que j’ai lancé, au sommet, était l’expression finale de toute la douleur contenue ces huit dernières années, mais aussi, surtout, l’expression d’une joie indicible, d’une exaltation hors du commun, car enfin, au prix d’un effort physique intense, je me suis retrouvée!
Je deviens tranquillement la personne que je rêve d’être, toute en nuances et en douceur, grâce à l’introspection que j’ai initiée à l’Hôtellerie. Du fond du cœur : MERCI!
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